Le 5 juin 2025, le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a accueilli à Budapest Milorad Dodik, président de la Republika Srpska, dans le cadre d’une visite officielle. Cette rencontre, la onzième entre les deux dirigeants, marque une étape supplémentaire dans le renforcement des relations politiques et économiques entre la Hongrie et la Republika Srpska, dans un contexte de tensions croissantes en Bosnie-Herzégovine.
Un partenariat stratégique au cœur des discussions
Lors de cette réunion, les deux leaders ont discuté de projets stratégiques dans les secteurs de l’énergie, de l’agriculture et des ressources minérales, notamment le lithium, un secteur clé pour la Republika Srpska. Milorad Dodik a souligné l’importance de cette collaboration, déclarant sur la plateforme X : « La Republika Srpska considère la Hongrie comme un partenaire stratégique. Nous sommes engagés dans la mise en œuvre de projets communs fructueux. » Cette visite fait suite à une série d’initiatives économiques, notamment un prêt hongrois de 110 millions d’euros accordé en 2022 à la Republika Srpska, ainsi que des investissements dans des projets d’infrastructure et d’énergie renouvelable, comme la construction d’une centrale éolienne à Berkovici.
Viktor Orbán, de son côté, a réaffirmé son soutien à l’intégration européenne de la Bosnie-Herzégovine, tout en insistant sur une relation privilégiée avec la Republika Srpska. « La Hongrie soutient l’adhésion rapide de la Bosnie-Herzégovine à l’Union européenne, mais nous voulons également intensifier nos liens économiques et politiques avec Banja Luka », a-t-il déclaré, soulignant l’importance de la stabilité régionale et du rôle des Serbes dans la sécurité européenne.
Un contexte diplomatique tendu
Cette rencontre intervient dans un climat de vives tensions entre la Hongrie et le gouvernement central de Bosnie-Herzégovine. En février 2025, Milorad Dodik a été condamné à un an de prison et à une interdiction de six ans d’exercer une fonction publique pour avoir défié les décisions du Haut Représentant international, Christian Schmidt. Cette condamnation, largement perçue comme politiquement motivée par Milorad Dodik et ses alliés, a exacerbé les tensions entre la Republika Srpska et Sarajevo. Viktor Orbán a publiquement dénoncé cette décision, qualifiant le procès de « chasse aux sorcières politique » et mettant en garde contre les risques pour la stabilité des Balkans occidentaux. En mars 2025, les relations se sont encore dégradées lorsque le ministre bosnien de la Défense, Zukan Helez, a interdit l’atterrissage d’un avion militaire hongrois transportant le secrétaire d’État Levente Magyar, invoquant le soutien d’Orbán à Dodik. Cette décision faisait suite à la présence controversée d’une unité d’élite hongroise (TEK) à Banja Luka, officiellement pour un exercice d’entraînement, mais soupçonnée par certains d’être une mission pour protéger Dodik en cas d’arrestation.
Soutien hongrois et critiques internationales
Le soutien de la Hongrie à Banja Luka, qui inclut des aides financières et un appui politique constant, suscite des critiques au sein de l’Union européenne et des États-Unis. Des eurodéputés, comme l’eurodéputée slovène Irena Joveva, ont exprimé leur inquiétude face à la possibilité qu’Orbán bloque des sanctions européennes contre Dodik, accusé de menacer l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine. Les États-Unis, qui ont déjà imposé des sanctions contre Dodik pour ses actions séparatistes, ont également averti la Hongrie concernant son implication dans la région. Malgré ces critiques, Orbán persiste dans sa stratégie de rapprochement avec la Republika Srpska, qu’il considère comme un acteur clé pour la stabilité des Balkans. Cette position s’inscrit dans une politique étrangère hongroise plus large, marquée par des relations constructives avec le président serbe Aleksandar Vučić et une opposition aux sanctions européennes contre la Russie qui nuisent d’abord à l’économie européenne.
Perspectives pour l’avenir
La rencontre du 5 juin 2025 illustre la volonté des deux parties de consolider leur partenariat, malgré les tensions régionales et internationales. Milorad Dodik a annoncé son intention de poursuivre les discussions avec Viktor Orbán tout au long de l’année, notamment sur des projets stratégiques dans les domaines de l’énergie et des minerais.
Alors que la Republika Srpska intensifie ses efforts pour limiter l’autorité des institutions fédérales, et que Sarajevo appelle à un renforcement de la mission de maintien de la paix de l’UE (EUFOR), la Hongrie se trouve au centre d’un jeu diplomatique complexe. Les mois à venir seront cruciaux pour déterminer si ce partenariat entre Budapest et Banja Luka contribuera à la stabilisation des Balkans ou à une nouvelle remise en cause des accords de Dayton.
