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Les Serbes fêtent Hélène d’Anjou, princesse française devenue reine serbe et sainte orthodoxe

Hélène d'Anjou et son fils le roi Milutin, sur une des fresques du monastère de Gracanica au Kosovo.

Le 30 octobre (selon le calendrier julien, soit le 12 novembre selon le grégorien), les Serbes fêtent Sainte Hélène d’Anjou. Cette princesse angevine est révérée par tous les Serbes, ainsi que par l’Église serbe en orthodoxe qui l’a déclarée sainte. En France, on l’a presque oubliée. Elle est pourtant un personnage central de l’amitié entre la France et la Serbie.

Hélène d’Anjou est née vers 1237 dans l’illustre famille française des Anjou. Vers 1250, elle est mariée au roi serbe Stefan IV Uroš Ier Nemanjić, pour renforcer l’alliance entre celui-ci et la famille d’Hélène. On raconte que la jeune fille fut accueillie par son futur mari dans la forteresse de Maglič, dans le sud de la Serbie, un château posé sur un promontoire au-dessus de l’Ibar. Bien qu’Uroš ait, selon la légende, fait recouvrir la route de pétales de fleurs, on imagine que la découverte a pu être rude pour cette jeune fille habituée à la douceur angevine et arrivant dans cette région de montagnes sauvages.

Elle devient rapidement une reine aimée de son peuple, à qui elle donne deux saints rois, Dragutin et Milutin. Elle est présentée comme un modèle de sagesse et de piété. Le roi Uroš finit sa vie comme moine sous le nom de Syméon. À sa mort, la reine Hélène se consacre entièrement à son peuple. Elle recueille des orphelins, fait construire des églises, des monastères, des écoles. Elle se consacre à la défense et à l’instruction de son peuple. Elle vit pauvrement. Sentant la mort approcher, elle devient religieuse. On raconte que son corps était toujours intact trois ans après sa mort.

Aujourd’hui encore, les Serbes honorent Hélène d’Anjou, qu’ils voient comme un des personnages centraux de leur Histoire, comme le montre par exemple la mise en place d’une grande pièce théâtrale à son sujet, qui a été présentée pour la première fois au public début octobre à Kragujevac puis a été jouée au Théâtre national à Belgrade début novembre.

L’auteur de la pièce, Jelena Kajgo, précise :

“Ça a été un grand défi de faire la lumière sur la vie et le caractère de l’une des personnalités les plus significatives du Moyen Âge serbe. Non seulement parce qu’elle a dirigé la région de Zeta pendant de nombreuses années et a donc grandement influencé la politique de la Serbie à cette époque, mais surtout parce qu’elle a contribué au développement de l’alphabétisation du peuple serbe en ouvrant de nombreuses écoles, notamment pour les jeunes filles.”

Jelena Kajgo insiste aussi sur la position d’Hélène d’Anjou, “en équilibre entre le catholicisme et l’orthodoxie”. En effet, née catholique et devenue orthodoxe à son mariage, Hélène d’Anjou est aussi représentative de la position d’équilibre où la Serbie veut se placer, aujourd’hui encore, comme l’explique Vladimir Kolarić, théoricien de la culture et de l’art, dans son article “Entre Orient et Occident : l’expérience de la Serbie” : la Serbie, trop à l’est pour être un pays de l’Ouest et trop à l’ouest pour être un pays de l’Est, a construit son identité sur cette position charnière, qui se lit encore aujourd’hui par exemple dans le fait qu’elle utilise officiellement deux alphabets, le latin et le cyrillique.

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