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La situation sécuritaire précaire de l’Église serbe orthodoxe dans la province du Kosovo-Métochie

Bien que la situation en matière de sécurité ne soit pas aussi grave qu’après la guerre et après les violences de mars 2004, on peut affirmer que, du moins en ce qui concerne l’Église orthodoxe serbe, la situation est loin de ce à quoi on pourrait s’attendre près de deux décennies et demie après la fin de la guerre. Pire encore, l’Église assiste à l’augmentation de certains actes contre ses biens au cours de ces dernières années, tels que des cambriolages, des vols ou des profanations de cimetières. 

Le problème le plus préoccupant concernant l’Église et sa sécurité est la situation autour du monastère de Dečani, qui est toujours gardé par la force militaire internationale de la KFOR. Le monastère a subi des attaques au mortier les années passées, des graffitis a la gloire de l’EI, des émeutes devant ses portes et ses moines sont jusqu’alors constamment harcelés dans les médias et dans la rue. La communauté internationale perçoit d’ailleurs que le monastère est toujours en danger, en raison de l’environnement hostile qui l’entoure. Une organisation internationale, Europa Nostra, a désigné le monastère de Dečani comme l’un des sites du patrimoine culturel les plus menacés d’Europe. Évidement, après ce rapport, l’organisation reçu de nombreuses critiques de la part des responsables et des médias au Kosovo, les accusant de travailler dans l’intérêt du Gouvernement serbe et contre les intérêts du Kosovo. Les réactions et critiquent iront même jusqu’à des menaces physiques contre les membres de l’ONG.

D’autres problèmes concernant l’Église sont les vols, les vandalismes, les actes de haine à divers niveaux, les profanations de cimetières, l’interdiction provisoire des personnes handicapées d’entrer au Kosovo ou dans certaines parties du Kosovo, les empêchant ainsi de participer à des cérémonies religieuses. Dans le cas des cimetières, les pierres tombales Serbes sont presque systématiquement renversées ou brisées au sol. Aucun de ces actes n’a jamais été classé comme crime d’origine ethnique ou religieuse, et aucun d’entre eux n’a jamais fait l’objet de poursuites dans le cadre de la procédure prescrite pour de tels actes.

Ce qui est particulièrement inquiétant, c’est la perception médiatique de l’Église orthodoxe serbe au Kosovo, qui est même alimentée par des déclarations de hauts responsables gouvernementaux du Kosovo ou d’individus qui leur sont liés.

L’un des problèmes est aussi la question des documents d’identification personnels pour le clergé. Bien que certains d’entre eux étaient au Kosovo avant la proclamation d’indépendance et aient demandé une carte d’identité dans le cadre d’une procédure régulière, ils n’ont jamais obtenu de réponse (dans certains cas, depuis plus d’une décennie). C’est potentiellement un énorme problème, car cela pourrait servir de base à l’expulsion du clergé Serbe orthodoxe du Kosovo. Malgré des pourparlers avec plusieurs gouvernements du Kosovo pour résoudre ce problème, de nombreuses promesses faites par des ministres, rien n’a été fait pour résoudre le problème à ce jour. Pire encore, il y a eu une tentative d’expulser un moine du monastère de Zočište, qui heureusement n’est pas allé au bout sous la pression internationale.

Enfin, le comportement de la police du Kosovo ne vise pas à résoudre les crimes contre l’Église, mais plutôt à les dissimuler. Aucun acte criminel commis envers l’église Serbe orthodoxe n’est jamais qualifié d’acte criminel motivé par haine religieuse ou ethnique, même lorsque le contexte de ces actes est très clair. Par exemple, la veille de Noël (calendrier julien) le 7 janvier 2022, des inconnus ont caillassé la maison paroissiale de l’enclave Serbe de Vitomirica et cela a été classé comme destruction de propriété privée. Quelques jours plus tard, un inconnu a vandalisé le chantier de reconstruction de l’église de Vitomiric. En février 2022, un inconnu a endommagé l’église du village de Heureš. La encore, la police du Kosovo n’a rien fait et l’enquête est toujours au point mort plus de deux ans après les faits.

Tous les actes sont classés soit comme des petits vols, soit des actes de vandalisme, soit des crimes mineurs contre les biens. De cette manière, les véritables motifs du crime sont cachés par l’institution même qui devrait être la première à protéger l’Église contre de tels actes criminels. En outre, la plupart des auteurs ne sont jamais découverts et, s’ils le sont par hasard, les peines pour ces actes sont minimes et pour la plupart les condamnations dérisoires et n’ont donc pas d’effet préventif sur la population en général.

Le cas du monastère Serbe de Visoki Decani

Visoki Dečani est un monastère du XIVe siècle, situé près de la ville de Dečani dans l’est du  Kosovo, construit par le roi serbe Stefan Uroš Nemanjić III (plus tard connu sous le nom de Saint Stefan Dečanski, du nom du monastère qu’il avait construit). C’est l’un des monastères les plus beaux et les plus uniques de l’Église orthodoxe serbe. C’est aussi l’un des rares monastères de cette époque qui a eu une pratique liturgique ininterrompue pendant plus de sept siècles. Le monastère de Dečani conserve le corps du saint roi Stefan Dečanski, qui est considéré dans la tradition orthodoxe comme pouvant accomplir de nombreux miracles. Il est sur la liste des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO. Avant la guerre de 1999, le site a été visité par de nombreux Albanais, qui y ont vénéré le saint roi Stefan.  Pendant la guerre de 1999, le monastère a servi d’abri à de nombreux Albanais fuyant les terreurs de la guerre. 

Après la guerre en 1999, ce monastère a été une cible fréquente des extrémistes albanais. Il y a eu plusieurs attaques au mortier sur l’enceinte du monastère, les moines ont été intimidés et ont dû avoir une escorte armée pour se déplacer. Dans la nuit du 17 mars 2004, plusieurs obus de mortier ont également été tirés sur le monastère, mais aucun d’entre eux n’a heureusement explosé. Dès le lendemain, un groupe de plusieurs centaines d’Albanais a tenté de venir au monastère avec l’intention d’attaquer le monastère, mais en a été empêché par les troupes de la KFOR. En 2007, un autre obus de mortier avait frappé le mur extérieur du monastère. En 2014, des graffitis de l’EI ont été écrits sur le mur extérieur du monastère, tandis qu’en 2016, la KFOR a arrêté des hommes armés et en voiture juste à l’extérieur du monastère. Des outils de propagande de l’état islamique ont plus tard étaient trouvés chez eux. Pour toutes ces raisons et les menaces constantes que le monastère continue de recevoir, les troupes militaires internationales de la KFOR gardent toujours le monastère.

Le cas de l’église du Christ Saint Sauveur a Pristina 

Avant la guerre de 1999, 40 000 Serbes vivaient à Priština. Après la chute du communisme, ils ont commencé à construire l’église du Christ Sauveur.  Les travaux ont cependant dû être arrêtés en 1998, en raison de l’éruption de violence au Kosovo. 

Comme l’église n’a pas été utiliser pendant de nombreuses années, elle avait été transformé en toilettes publiques par la population locale Albanaise. Des alpinistes kosovars sont montés sur le sommet de l’église pour selon leurs termes, « le conquérir ». Une chanteuse albanaise a aussi filmé une vidéo dans le temple, avec des motifs offensants pour l’Église Serbe orthodoxe et ses fidèles. Ne voulant plus supporter ce sacrilège, l’évêque de Raška-Prizren, en septembre 2016, est venu au Temple avec des prêtres, des religieuses, des moines et plusieurs laïcs, pour procéder au nettoyage de l’église et de ses environs. L’action devait durer deux jours, mais le deuxième jour, devant des représentants de la communauté internationale, deux inspecteurs de la police du Kosovo sont venus et ont emmené le secrétaire du diocèse au poste de police, où il a été détenu et a reçu l’ordre d’arrêter tous les travaux de nettoyage du temple, avec pour conséquences implicites l’arrestation de tous ceux trouvés sur le site. 

Le 10 juin 2021, l’évêque a servi une liturgie dans l’église, la première depuis la fin de la guerre. La liturgie a été suivie par une vingtaine de personnes au total. Après que les politiciens albanais aient découvert cela, ils ont commencé une campagne de calomnie non seulement contre le l’église, mais aussi contre l’évêque, qualifiant la liturgie de « politique », Dans la nuit du 10 au 11 juin, quelqu’un a écrit sur les portes de l’église, en anglais, « Jésus hait les Serbes ». Le lendemain, une manifestation a été organisé avec la bénédiction de Albin Kurti, premier Ministre du Kosovo. L’église a de nouveaux été endommagé et vandalisé, le tout devant des membres de la police du Kosovo.

La Rédaction de Balkans-Actu

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