Alors que les élections municipales se dérouleront dans 142 communes le dimanche 6 octobre en Bosnie-Herzégovine, les regards sont principalement tournés vers Banja Luka, capitale de la République Serbe de Bosnie-Herzégovine, où les enjeux dépassent la ville elle-même.
Trois favoris s’affrontent pour le futur de la ville et peut-être même de l’entité serbe. Le maire sortant, Draško Stanivuković (PDP), défend sa position qui est convoitée par deux autres favoris, Nikola Šobot soutenu par le SNSD de Dodik et Jelena Trivić soutenue par le parti d’opposition Narodni Front.
Stanivuković a décidé de baser sa campagne avant tout sur son propre bilan avec le slogan « Les actes ». En effet, il déclare qu’il n’y a « pas une partie de la ville où quelque chose n’a pas été construit. Nous avons les plus grands projets pour Banja Luka, et quand je lis les programmes des autres, ils promettent la même chose que nous, plus précisément, ils ont promis tout ce que nous avons déjà fait au cours de ces quatre années ». Il est vrai que le maire sortant dispose d’atouts importants de son côté, Banja Luka a considérablement évolué urbanistiquement durant son mandat avec la construction de ronds-points pour fluidifier les boulevards, de parcs ou de monuments. Malgré quelques critiques sur ces projets, il s’agit d’arguments sérieux en sa faveur puisque la ville était restée figée dans le passé avant son arrivée à la mairie en 2020.
Afin de poursuivre cette métamorphose, Stanivuković souhaite miser sur le transport public avec la construction d’une première ligne de tramway, l’établissement de lignes de bus électriques gratuits, la constructions de parkings, d’un téléphérique pour relier la ville à Banj Brdo (une colline culminant à 431m), mais aussi par la construction d’une station d’épuration pour la rivière Vrbas. Ces élections sont donc l’opportunité pour lui de consolider sa place d’homme fort, personnage sûr de lui, bon orateur, à l’aise avec les réseaux sociaux, la politique et lui semblent liés pour les prochaines décennies en Republika Srpska.
Le SNSD de Dodik a quant à lui perdu la mairie lors des dernières élections et a décidé de miser une figure non-partisane peu connue du grand public. Nikola Šobot est médecin et chirurgien cardiaque, le plus grand parti serbe a choisi un candidat renvoyant une image rassurante, d’intégrité et de “bon père de famille”. Pari risqué pour Dodik alors que l’ancien maire Igor Radojičić soutenu par le SNSD avait perdu il y a 4 ans avec un profil similaire ?
Du côté des mesures, le programme semble moins bien préparé, Šobot insiste également sur la nécessité de construire une station d’épuration pour préserver Vrbas. Peu de changements drastiques sont annoncés, la campagne semble davantage axée sur les valeurs familiales avec la construction d’écoles et de crèches et la figure omniprésente de Dodik dans ses vidéos de promotion. Une candidature reposant donc pour beaucoup sur l’image rassurante de Nikola Šobot avec le SNSD et les institutions en soutien.
Jelena Trivić est le troisième candidat principal de ces élections, avec le parti Narodni Front à ses arrières. L’universitaire professeure d’économie cherche à prendre sa revanche après sa défaite lors des élections de 2022 pour la présidence de la République Serbe de Bosnie-Herzégovine. Elle se présente aux élections sous le slogan “Brave, honorable, Jelena“. En effet, elle affirme qu’elle se bat contre “deux des candidats de Dodik”, reprochant ainsi au maire actuel de coopérer avec les autorités de la Republika Srpska. C’est la candidature anti-corruption de ces élections, principale figure de l’opposition plus favorable à des relations normalisées avec Sarajevo. Parmi ses mesures phares il y a donc la volonté de mettre de l’ordre dans la mairie avec l’interdiction pour les magnats d’entrer dans les locaux de l’administration municipale et la révision de tous les contrats que les entreprises possédant avec eux ont conclus avec la ville. En effet, plusieurs projets de construction sont dénoncés pour cause de manquements juridiques ou collusions.
Le maire sortant Draško Stanivuković part donc en tant que grand favori ce dimanche, mais les élections se jouent également au niveau des élus municipaux puisque 31 sièges sont disputés. L’enjeu pour lui est de se renforcer avec davantage d’élus municipaux et de mieux se structurer. Quant à Milorad Dodik, il compte sur Nikola Šobot pour essayer de récupérer la mairie de Banja Luka mais le SNSD dispose d’une forte emprise sur toutes les institutions et part favori dans la majorité des communes de Republika Srpska. En dernier lieu, Jelena Trivić, que l’on voyait aux côtés de Stanivuković dans le passé, cherche à s’imposer comme la figure anti-corruption de l’opposition avec son nouveau mouvement Narodni Front en dénonçant une symbiose Stanivuković-Dodik.