Guerre et politique dans le cinéma serbe

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Depuis la naissance du cinéma, la Serbie s’est toujours impliquée dans la réalisation d’œuvres cinématographiques en fonction du contexte politique et des époques. Utilisé à des fins de propagande sous l’ère « Titiste » (Tito lisait même les scénarios avant tout le monde), le cinéma serbe est très généralement chargé d’événements historiques, de messages philosophiques ou parodiant la vie politique quotidienne.

En effet, il faut remonter dès 1896 avec André Desiré Carré, un représentant des frères Lumières, qui était le premier à avoir projeté une série d’images animées à Belgrade, avec des photographies de la ville même. Mais c’est en 1911 que le cinéma Serbe est né avec son plus vieux film : La vie et les actes de l’immortel Voïvode Karađorđe, un film biographique sur le héros de la première révolution Serbe et premier roi de la dynastie des Karađorđević.

Le peuple Serbe, à cheval entre le nouvel état Serbe et la Voïvodine, province de l’Empire Austro-Hongrois, a pu également développer son cinéma localement, avec l’ouverture du tout premier cinéma à Sombor en 1906. Période très trouble entre la fin de la présence Ottomane, les deux guerres Balkaniques, le début de la Première Guerre mondiale, ces événements ont pu être représenté dans le cinéma Serbe, comme avec le couronnement du roi Pierre Ier de Serbie filmé en 1904. Une section cinématographique a même été fondée par l’armée Serbe sur l’île de Corfou lors de la grande retraite pendant la Grande Guerre.

Sous le royaume de Yougoslavie, 12 films ont été produits avant le début de la Seconde guerre
mondiale, où la période d’entre-guerres y était fortement représentée avec le film Le Golgotha
Serbe
réalisé en 1930 par Stanislav Krakov, journaliste guerrier et réalisateur. Entre 1918 et 1931 peu de films serbes ont été produits en raison du contexte économique et de la concurrence étrangère. Le film le plus notable de cette période fut La Bataille du Kosovo de Mihajlo Popović sorti en 1939. Le cinéma Serbe fut en berne pendant la guerre en raison de l’occupation.

Après la Seconde Guerre mondiale beaucoup de films servaient de propagande au régime titiste et représentait un aspect héroïque de la « résistance partisane ». La période des « films partisans » ont donné naissance à beaucoup de films yougoslaves comme l’œuvre célèbre de La Bataille de la Neretva produit par Veljko Bulajić en 1969 où même des acteurs internationaux célèbres comme Yul Brynner y ont joué un rôle. Co-produit par les Etats-Unis, l’Italie, l’Allemagne de l’Ouest et l’Italie, le film a atteint un budget de 12 million de dollars US, et a été financé même par Tito en personne. L’affiche du film pour sa version anglaise a même été gratuitement réalisée par Pablo Picasso en l’échange d’une « caisse des meilleurs vins Yougoslaves ». L’importance du message politique était conséquent pour le régime communiste yougoslave qui a financé tout une série de films politiquement orienté avec une autre réalisation célèbre Walter défend Sarajevo en 1972, dont le rôle principal a été joué par Bata Živojinović.

Les années 1960 et 1970 ont vu également une série de films moins « politiquement corrects » avec la «Vague Noire» démontrant un mouvement culturel moins glorieux de la société Yougoslave avec de l’humour noir et un tournage en dérision du régime socialiste, poussant à une censure du gouvernement pour « tendances contre-révolutionnaires ».

Il faudra attendre la fin du régime socialiste et la dislocation de la Yougoslavie pour voir apparaître un nouveau type de cinéma dans les années 1990 et début des années 2000, en particulier par le très célèbre Emir Kusturica. Son film Underground, sur la vie pendant la Seconde Guerre mondiale a remporté la Palme d’Or. D’autres films comme Chat Blanc, Chat Noir deviennent très populaires, où nous y retrouvons la vie des Roms au cinéma, jusqu’à alors peu représentée. La vie est un miracle fut également l’un de ses chefs d’œuvres.

Le cinéma Serbe a pu se développer au fur et à mesure des époques et des régimes politiques. En un siècle le pays est passé de régimes impériaux, au royaume de Serbie puis à une Yougoslavie monarchiste, devant ensuite un régime communiste pour finir avec une démocratie libérale. Comme les événements étaient très marqués, l’inspiration dans le cinéma Serbe ne manquait pas.

Atanasije BECAUS

Image de La rédaction de Balkans-Actu

La rédaction de Balkans-Actu

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