USA : la diplomatie du bulldozer

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Comme les médias l’ont annoncé, Christopher Hill a été nommé ambassadeur des États-Unis à Belgrade, et avec Matthew Palmer et Gabriel Escobar, le trio en charge des Balkans sera une reprise de la « pièce d’Holbrooke », qui vise à donner l’impression que nous nous trouvons dans les années 90, analyse Srdja Trifković, ancien directeur de l’Institut Rockford pour les relations internationales dans l’Illinois.

Palmer, Hill et Escobar, en plus d’être des fonctionnaires de l’administration américaine, sont liés au défunt Richard Holbrooke, qui, rappelle Trifković, a reçu le surnom de « Bulldozer » en raison de sa politique envers les Balkans.

Le nom de Richard Holbrooke est resté dans les mémoires en Serbie pour les décisions qu’il a prises, tant en Bosnie-Herzégovine qu’au Kosovo, principalement au détriment des Serbes. Après la signature des accords de Dayton, il a été remplacé par Matthew Palmer, qui a récemment été en charge de la réforme judiciaire en Bosnie-Herzégovine. Christopher Hill, qui était considéré pour devenir le nouvel ambassadeur américain à Belgrade, était appelé « le bras droit d’Holbrooke », et il faisait partie de l’équipe lors des négociations de Rambouillet, dont l’échec a conduit au bombardement de la RFY.

Une tentative de réitération de la méthode d’Holbrooke

Gabriel Escobar, actuel conseiller spécial des États-Unis pour les Balkans, a également suivi une « formation à la diplomatie d’Holbrooke ».

Étant donné que le complément de la « Troïka Holbrooke » coïncide avec la plus grande crise au Kosovo, qui est au bord du conflit armé, ainsi que le mouvement de plus en plus visible des événements en Bosnie-Herzégovine vers l’abolition de la Republika Srpska, la question se pose de savoir si la « La diplomatie du bulldozer » revient avec eux. 

Le professeur Srdja Trifković, affirme qu’il s’agit d’une tentative d’établir un parallèle et de créer l’impression de suprématie qui prévalait à une époque où Richard Holbrooke était le maître des lieux.

« Le parallèle est qu’au sens scénographique, ils veulent donner l’impression qu’on a une rediffusion de la pièce d’Holbrooke, ce qui n’est essentiellement pas le cas. C’est-à-dire que nous avons une rediffusion d’un théâtre diplomatique dans lequel, par une simple pièce de théâtre, ils essaient d’obtenir le consentement et les compromis des Serbes pour lesquels ils n’ont pas l’autorité, et d’intensifier les menaces et les mesures actives, si les Serbes refusent », explique Trifkovic.

Le NON serbe n’entraîne aucune conséquence aujourd’hui

À son avis, on ne sait pas assez en Serbie que le Département d’État américain est une institution qui s’efforce en fait d’imposer sa ligne politique et idéologique déjà établie aux administrations successives dans certaines parties du monde, y compris les Balkans.

« En même temps, dans leur performance souvent arrogante et violente, ils essaient de donner l’impression qu’ils ont plus de pouvoirs qu’ils en ont. Nous avons vu cela avec Brian Hoyt Yee et Pierre-Richard Prosper (ancien ambassadeur américain pour les crimes de guerre) et bien sûr maintenant avec ces messieurs (Palmer Hill, Escobar). Parce qu’ils veulent donner l’impression qu’au plus haut niveau de la Maison Blanche – le Conseil de sécurité nationale, la décision sur la manière dont les choses doivent se passer dans cette région a déjà été prise et que la Serbie et les Serbes hors de Serbie seront sévèrement punis s’ils ne s’y alignent pas. Ce qui n’est pas vrai », affirme notre interlocuteur.

« Quand ils essaient de calmer les relations avec la Russie, précisément parce qu’ils ne veulent pas s’engager pleinement sur deux fronts – à la fois contre l’influence russe sur le sol européen, et dans la suppression de la Chine dans la zone indopacifique, alors dans cette situation, ces messieurs essaient avec un jeu d’acteur malhonnête, auquel ils sont bien formés, de créer l’impression que les décisions sont déjà prises depuis bien longtemps et que toute résistance est vaine », dit Trifković.

Les situations tendues ne conviennent pas à l’Europe

Notre interlocuteur ajoute que, d’autre part, les Européens ne veulent pas non plus être pleinement engagés, surtout pas dans une situation où les relations au sein de l’UE sont perturbées.

« Donc, dans cette situation, l’aggravation des relations dans notre région, qui inclurait des menaces et des sanctions militaires, est tout simplement hors de question. Et c’est pourquoi il devrait y avoir une prise de conscience du côté serbe que, cette fois, un NON ferme n’entraîne pas de conséquence. En d’autres termes, Palmer, Escobar et Hill sont comme des agents de recouvrement qui se présentent à votre porte et commencent à menacer de vous casser la jambe. En l’espèce, ils essaieront d’agir de la même manière qu’Holbrooke dans les années 1990, mais je pense que tout restera au niveau d’une simple tentative », dit-il.

En d’autres termes, il n’y aura ni sanctions ni menaces de force armée, Trifković en est convaincu.

Hill retiré de sa retraite

Trifković mentionne également que Hill a été retiré de sa retraite diplomatique afin de venir dans cette région, mais qu’il ne s’attend pas à faire un virage copernicien. Et lorsqu’on lui demande pourquoi Christopher Hill a été retiré de la retraite si on n’attend pas quelque chose comme ça de lui, Trifković répond :

« Parce qu’ils pensent que la réputation même de Christopher Hill en tant qu’adversaire dur et dangereux qui aime dicter les conditions et diriger des résultats prédéterminés impressionnera (c’est-à-dire, intimidera) les Serbes. »

Selon Trifković, les diplomates sont des personnes qui ne prennent pas de décisions clés : ils mettent en œuvre des politiques, mais parfois ils veulent donner l’impression, d’une manière ou d’une autre, qu’il n’y a pas d’alternative à leur politique prédéterminée.

Auteur : Brankica Ristić

Source : Sputnik

La rédaction de Balkans-Actu

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